Pétrie de culture catholique (par ma famille et par ma formation), j’interroge à travers globes, boîtes et autres contenants, quelques formes du sacré et quelques « vérités humaines », via la
réunion non arbitraire de mots découpés (dans Les Champs d’honneur de Jean Rouaud, les Quatrains d’Omar Khayyam, des missels, bref des livres choisis), petits objets glanés ou
fabriqués, morceaux épars.
Je tente de constituer avec ces éléments signifiants de nouveaux trésors (puisque les trésors religieux étaient et sont contenus dans des boîtes / coffres de toutes sortes), si tant est qu’il
puisse en exister encore.
Les contenants, selon qu’ils sont en verre ou pas, cachent ou révèlent, exposent quelquefois d’emblée, des secrets qui parlent à tout le monde : des citations riches de réflexion. Ils sont vieux,
ainsi puis-je utiliser leur « richesse historique », comme la force sacrée des anciens sites religieux.
Tout part de mon intérêt pour les reliquaires et les objets religieux qui se rapportent au culte des morts. Dans ce même genre, j’associe la catégorie des vanités. Le reliquaire chrétien est un
coffre, une boîte, une châsse, de la taille d’une médaille ou d’un homme, qui peut montrer ou pas, c’est selon. Lorsqu’il/elle montre, on peut y voir des bouts d’os, voire un squelette entier,
entourés de mille infimes décors qui les mettent en valeur : perles, fleurs, paperolles, galons, dorures, etc.
Si l’on se déporte dans d’autres civilisations, en Océanie par exemple, le décor prend la forme de dents, de cheveux, de graines, de peintures, etc., mais il est tout aussi présent. J’assemble de
tels éléments dans les objets que je fabrique, dans lesquels on retrouvera donc tout autant du papier que des cheveux. Je les réunis la plupart du temps autour de citations, représentantes de la
sagesse humaine via
la forme aboutie et achevée de l’écriture.
Je suis portée vers des objets plutôt petits, et comportant un principe de réalisation minutieux et long (technique du papier plié, dentelle duchesse, etc.), qui induit un temps d’exécution
important
- je produis peu de pièces. Les créateurs de l’art brut, pour certains laborieux et répétitifs, me sont familiers depuis longtemps. De ces artistes inconnus et solitaires, je retiens la puissance
de création, l’obsession, la précision, la réitération. Et l’anonymat. Ce que je crée fait également écho à tout l’artisanat féminin du XIXe
siècle, pratiqué par d’autres anonymes - religieuses et ouvrières. Les premières réalisaient des reliquaires en papier plié, par manque d’argent pour acheter de l’or ; les secondes ont fabriqué
des kilomètres de dentelles pour ceux qui pouvaient se les offrir - c’est dans cette optique aussi que j’apprends la dentelle duchesse depuis trois ans. Toutes leurs réalisations étaient de réels
trésors - de l’ombre. Je me place volontiers dans cette lignée.